Solénoïde
Littérature / mai 17, 2020

Mircea Cartarescu Solénoïde, Éditions Noir sur Blanc : Paris, 2019, 791 p. A chaque instant de notre vie, nous opérons des choix, ou nous sommes poussés par un souffle de vent dans une direction plutôt que dans une autre. La trajectoire de notre vie se solidifie sur notre passage, se fossilise et acquiert de la cohérence mais aussi la simplicité du destin, alors que nos vies qui auraient pu être, qui auraient pu se détacher à chaque instant de la gagnante, restent des lignes en pointillé, fantomatiques : des créodes, des différences de phase quantique, diaphanes et fascinantes comme des tiges qui végètent dans une serre. Je cligne des yeux et ma vie se ramifie, car j’aurais pu ne pas cligner et alors j’aurais été un autre, toujours plus éloigné de celui qui a cligné des yeux, comme s’éloignent des rues disposées en rayons autour d’une place étroite. A la fin, je serai enroulé comme par un cocon de fils translucides de milliards de vies virtuelles, de billions de voies sur lesquelles j’aurais pu m’engager, changeant de manière infinitésimale l’angle de progression. Nous nous retrouverons, après l’aventure d’une vie, mes milliards de moi, possibles, probables, accidentels et nécessaires, chacun arrivé…